jeudi 29 août 2019

Après les Sex Pistols, 6 années musicales qui vont dans tous les sens (4)


Donna Summer, et "I Feel love", enregistré en Allemagne, avec uniquement des synthés, le premier  hit disco sexy, oeuvre de Giorgio Moroder

Les groupes de la nouvelle vague qui suivit 1977 avaient déjà un passé, mais ils trouvèrent en cette période une maturité passionnante. On ne s’étendra pas sur l’historique ou leurs cheminements, mais quelques villes furent le lieu de leur développement comme Sheffield, Manchester, Coventry, et évidemment Londres. La New Wave, ou le post punk, est un chapitre trop important et diversifié pour être développé dans un seul post, mais pour rappel, voici quelques tendances qui entrèrent dans la décennie anglaise des années 80 (on passera sur la scène américaine, même si elle tissa des liens avec les britanniques, principalement suite au « groove » du disco qui, de 1977 à 1979, inventa une musique et un style de vie hérité de l’allemand Giogio Moroder, et ses rythmes hypnotiques entièrement conçus par ses synthétiseurs, sur lesquels miaulait Donna Summer (« I Feel love »)

Et si les synthétiseurs de Kraftwerk, qui firent le son de nombreux groupes anglais étaient éloignés des sonorités américaines, le "post punk" trouva dans la scène black américaine, des liens qu’elle ne cultivait pas avec la scène « blanche » US. Ajoutez à cela une forte influence de la Jamaïque, et nous avons trois ingrédients qui firent les beaux jours des meilleurs représentants New Wave.
Avant de citer quelques tendances, il est assez étonnant de remarquer, comme il fut dit dans le texte précédant, que, une fois la fin des années 80 et l’épuisement de la plupart des groupes qui enchantèrent l’Angleterre et l’Europe, il y eut un abandon du « look », qui caractérisa cette décennie, et, on vit apparaître des artistes qu’on pourrait qualifier de « punk », musicalement ! Ce fait,qui semble anachronique, est dû au fait qu’ils ne se concentraient pas sur une quelconque attitude, mais qu’il s’agissait de réels musiciens qui jouaient un rock sans concession, plutôt saignant.
Ces ensembles existent jusqu’à aujourd’hui et sont connu comme faisant partie de la scène « Oi ! ». Ne me demandez pas le pourquoi de cette appellation, qui trouva son correspondant américain dans le hardcore, et qu’on associa un peu rapidement à des musiciens issus de la classe populaire, proche du hooliganisme.

                           Ex-Ultravox, John Foxx fut un des plus inventifs  avec ses machines improbables

Pour revenir au post punk, à partir de 1978, les synthétiseurs se démocratisèrent, devinrent polyphoniques et dominaient la « cold wave » de John Foxx, The Human League (dans ses deux premiers albums non commerciaux), Orchestral Manœuvres in the dark, plus mélodique, Soft Cell (tendance sado maso gay electro !) ou Gary Numan, qui derrière un look froid aligna une série de hits irrésistibles (Cars, Are friends elecric...). 

 "Non Stop Erotic Cabaret", premier album de Soft Cell, avec Marc Almond et Dave Ball, et le fameux "tainted love"

Mais la guitare gardait sa place avec une scène gothique mené par The Cure, Siouxsie and the Banshees ou Bauhaus. Assez proche de ces derniers, une scène sombre et dépressive avec Joy division, Sister of Mercy ou Cockteau Twins vit le jours dans un même temps. 
Difficile d'être plus gothique, Siouxsie Sioux....

                        ....ou suicidaire avec Joy Division, et son leader Ian Curtis (à gauche)


 A l’opposé, les Nouveaux Romantiques visaient les charts avec leur pop glam dansant, comme Duran Duran et Spandau Ballet, ou d’autres qui eurent une carrière d’un seul hit comme Visage, tous des enfants de David Bowie, à une époque où les clips, et donc le visuel, égalait la musique (pour les meilleurs). 


                      Retour  vers le passé avec le phénomène proche de la Beatlemania de Duran Duran 

La bourse ou la vie, Adam & the Ant intégra des rythmes tribaux à leurs deux excellents premiers disques

Le temps étaient aux habits de marquis, aux jabots, et bottes hautes et aux costumes pirates tel que les portaient Adam and the Ants, groupe dont on retiendra les deux premiers albums. Peu après allait naître une pop « sylvestre », légère, dont les meilleurs représentant furent China Crisis, Aztec Camera, Haircut 100, ou Tears for Fears.
Au milieu de ces dizaines de groupes, quelques électrons libres, parfois électroniques, parfois plus organiques comme Echo and the Bunnymen, Depèche mode, Lloyd Cole and the Commotions, XTC, Paul Haig, les écossais de Big Country et de Simple Minds, The Pretenders, Thomas Dolby, The The, les irlandais de U2, et bien sûr The Police


Comme beaucoup de ces groupes, Simple Minds, auteur de 4 disques indispensables, perdit son originalité  dès son premier succès, "Don't you".

 Plus les succès se succédaient, plus les groupes devinrent plus pop et commerciaux comme Culture Club, Yazoo, Kajagoogoo, ou Bananarama. Cela commençait à sentir l’exploitation au détriment de la création. Même si des groupes qui buvaient à la source du « funk black », comme ABC, Swing out Sister, The Style Council, Ian Dury and the Blockheads ou Wham ! arrivèrent avec des "skuds" qui leur donna accès aux premières places des charts anglais et européens. 

               Plastic funk? ABC fut l'un des groupe anglais à confesser son penchant pour le funk noir US

Enfin, dans un créneau plus art-rock, dans la lignée d’Eno et de Roxy Music, Japan était inégalable, et Talk Talk allait se distinguer dès 1986 avec « The Colour of Spring »
Et pour finir sur une note très sautillante et bon enfant, une série de groupes allaient faire s’entrechoquer les jeunes sur les pistes de danse : Madness, The Selecter, The Beat, ou The Specials, faisant renaître le ska, style frénétique des années 1950 en Jamaïque, alors sous tutelle anglaise, par le biais du label 2-tone. Le ska, bien antérieur au reggae – qui date de la fin des année 1960 -, se voulait multiracial, d’où les pochettes de disques dominés par les damiers noirs et blanc. 

                                              The Specials, et le design à damiers du label 2-tone

 Vers 1985, la baisse de qualité vit cependant apparaître encore quelques groupes cultes tel The Smiths, un des plus grands quatuor (très anglais !)  de la musique populaire anglaise, qui prouvèrent qu’avec une formation classique : guitare (Johnny Marr), basse, batterie et chant (Morrissey), on pouvait encore inventer une poésie qui prenait aux tripes, et cela en seulement 4 albums et une vingtaine de singles. 

 Johnny Marr, musique, et Morrissey, texte, deux trop forte personnalité, mais 4 albums (entre 1984-87), indispensables

C’est volontairement que je ne citerai pas d’importants groupes américains, pour éviter une énumération indigeste, mais on y reviendra. Le but de ces posts étant d’évoquer initialement la surestimation du mouvement punk, qui n’en fut pas vraiment un, mais qui aura eu le mérite d’ouvrir la porte à tous ces artistes dont certains deviendront immenses. Il est cependant étonnant que la littérature musicale ait longtemps dénigré cette première moitié des années 80, la qualifiant d’artificielle, mais il faut revenir à l’époque et s’imaginer (je me souviens fort bien !), que les synthés ne faisaient pas l’unanimité et étaient vu comme instruments artificielles, dont un non-musicien pouvait tirer un orchestre symphonique avec un accord de trois doigts. Mais l’équilibre du temps a remis les choses à leur importance, et, on laissera aux protégés de Malcolm Mc Laren (et d’autres groupes de moindre importance), qu’elle l’accéléra l’éclosion de la New Wave sous ses diverses expressions. Et ce n’est pas un moindre mérite! 

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